Lyon "gangrénée" par une mafia africaine ?

Le rendez-vous est pris au petit matin, au dernier étage de l'hôtel Sofitel. Une vision panoramique s'offre à nous, celle d'une ville qui s'éveille, celle des voyageurs pressés de prendre leur train en gare de Perrache, celle des grues du quartier de la Confluence en construction, qui reprennent peu à peu leur harmonieux ballet dans le ciel lyonnais.

Mais derrière cette façade de ville tranquille et prospère, une autre cité  s'endort. Une ville "underground", celle des trafics et de la prostitution. C'est de cette autre face de la ville dont veut nous parler Loulou Dédola.

Loulou Dédola vient de publier un livre "à clef", en fait une version romancée d'un scénario qu'il compte bien adapter à l'écran. Son titre : 419 African Mafia .

Retour dans les années 80 : Dédola est le leader d'un groupe de musique, RCP (pour Raze City Plage) à Vénissieux. Il a déjà "du mal à accepter les réseaux" nous dit -t-il. "Je hais ces organisations qui font que des fonctionnaires installés dans des administrations ou des MJC décident de ce qui est bon ou non, de qui peut tourner dans des salles de concerts". Lui fonctionne plus au contact, au feeling. Il fait des rencontres, se marie et commence à tourner... en Afrique. "Esprit indépendant", il découvre alors des liens entre les milieux du show business, des banlieues, de certaines ONG officiellement humanitaires, avec une organisation mafieuse, la 419, au Nigéria".

"J'ai infiltré la mafia nigériane"

A un journaliste sénégalais qui s'amuse un peu des "grands mots" employés, il certifie : "Oui, j'ai infiltré la mafia nigériane". Pour preuve, des policiers spécialisés l'auraient "débrieffé" au cours de plusieurs rencontres. "L'organisation criminelle nigériane constitue à mes yeux le plus grand service provider des groupes mafieux internationaux" écrit d'ailleurs l'un d'eux.

Les connaisseurs de la "nuit" lyonnaise retrouveront beaucoup de repères dans ce livre dont l'action se déroule en partie à Lagos (la ville la plus dangereuse du monde, si dangereuse que la capitale du pays a dû être transférée ! ) et en partie à Lyon.
Dans son langage imagé, Dédola nous fait pénétrer dans la "zone grise" de la ville. Car les mafieux ne sont pas des gens aux activités 100% criminelles. "419 African Mafia " montre bien comment, à partir de la participation à une petite escroquerie "sympathique" par internet on peut facilement basculer vers un trafic de faux papiers... ou comme il est facile d'instrumentaliser les bénévoles de l'aide "humanitaire" aux travailleurs clandestins pour alimenter les réseaux de prostitution les plus sordides !

A Lyon, la guerre que se sont livrés les réseaux est-européens et africains pour le contrôle de la prostitution ne semble pas terminée. On en est plutôt à un "status quo", "mais avec un net avantage pour les nigérians", indique Dédola. Une situation particulièrement difficile à appréhender à l'heure d'internet et des compagnies d'aviation low coast. "Je connais des cas de personnes qui ne voyagent à Lyon que quelques jours par mois, juste le temps de rencontrer des clients réguliers", nous assure un travailleur social.

"Mon projet n'est de faire ni un film de flic ni un film de voyou", assène Dédola. "Je veux d'abord raconter ce que j'ai vu, témoigner tout en divertissant les gens qui me lisent". Son sujet et sa personalité ont en tous cas déjà séduit beaucoup de monde, à commencer par le PDG d'un laboratoire pharmaceutique qui a financé l'édition du roman. Le film viendra après !

Gilles Roman

Commander 419 African Mafia

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