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C'est sans doute l'une des énigmes les plus difficiles à résoudre de l'Histoire de Lyon : des galeries souterraines ont été mises à jour sur près de deux kilomètres. Mais rien ni personne n'avait été jusqu'ici capable de donner une explication à la construction de ces tunnels en forme d'arêtes de poissons qui courent du plateau de la Croix Rousse jusqu'au Rhône.
Une équipe de chercheurs, anthropologues et archéologues du service d'archéologie préventive de la ville de Lyon s'est attelée durant plusieurs mois à un long travail de cartographie de ce réseau. Il s'agissait pour une part de prévenir les éboulements en cas de nouveaux chantiers (en particulier le percement du deuxième tunnel sous la Croix Rousse). D'autre part, l'équipe d'historiens devait tenter de dater la construction et d'en comprendre la signification.
M.A.J 01/2018: une visite des fameuses "arêtes" par une équipe de France3
Un réseau mystérieux pour lequel il n'existe aucune archive historique
Concrètement, le réseau comprend 34 galeries parallèles. Ces galeries, baptisées "arêtes de poissons" du fait de leur configuration sont reliées entre elles par un tunnel central. Elles se situent largement au dessus de la nappe phréatique, ce qui permet d'exclure une raison de drainage hydraulique à leur construction. Chaque point de convergence des arêtes aurait donné lieu au percement d'un puits mais avec le temps, la plupart de ces puits ont été remplis ou murés. Enfin pour en terminer avec les "indices", il n'y a aucune trace d'utilisation intensive de ces galeries : pas de traces de suies liées à la mise en place de systèmes d'éclairages, pas de déchets, seulement à certains endroits des empreintes de mains de petite taille qui laissent supposer que des enfants ont été employés pour la construction. Les pierres de taille ont quant à elles été localisées ; elles sont issues des bords de saône.
Une construction liée à la citadelle érigée par le roi Charles IX ?
Pour Cyril Ducourthial, qui a participé aux recherches, l'absence d'archives laisse supposer une construction à l'insu des lyonnais. La datation des premières découvertes du réseau (des puits mis à jour lors de constructions d'immeubles à la Croix Rousse) permet d'envisager un percement de ces galeries entre le XVème et le XVIIème siècle.
Un plan d'espion découvert à Turin
Un plan d'espion découvert dans les archives de la ville de Turin a permis d'élaborer une hypothèse intéressante. Ce plan donne le tracé d'une citadelle construite en 1564 par le roi Charles IX (fils de Catherine de Médicis) qui venait de pacifier Lyon mais qui sans doute se méfiait des lyonnais. Le tracé de la citadelle, tel que décrit par cet espion recouvrirait parfaitement (en surface) les galeries mises à jour. Les archives de la ville de Lyon permettent d'établir avec précision que la citadelle a été détruite en 1585. Les habitants ont alors eu l'autorisation de la démonter "à leur frais et de telle manière qu'il n'en reste aucune pierre l'une sur l'autre" indique l'adjoint à l'urbanisme Gilles Buna.
"Cette hypothèse est séduisante car elle donne une explication aux galeries", note Gilles Buna : On peut imaginer que le Roi a fait construire en secret un réseau pour relier la citadelle au fleuve afin d'assurer son alimentation en cas de siège. "Quand la citadelle a été déconstruite, il n'y avait plus lieu de terminer les galeries". Ce qui expliquerait leur fin en... queue de poisson !
M.A.J 03/2017: A noter que cette hypothèse semble avoir été remise en cause par la datation au carbone 14 de certains éléments relevés dans les souterrains Dans un document très détaillé (voir ici) , il est indiqué que "menées par deux laboratoires distincts" sur quatre échantillons, trois d'entre eux datent du changement d'ère et un quatrième du IIIème ou IVème siècle AV. J.C ! - ndlr -
Depuis l'éboulement mortel de Fourvière au cours du vingtième siècle, un service spécialisé est chargé par le Grand Lyon d'assurer la sécurité et la cartographie des galeries souterraines de Lyon. La protection étant assurée, il n'y a pas lieu de demander un classement historique car "fou serait celui qui voudrait détruire ces balmes" indique Gilles Buna. Concernant les arêtes de poisson, deux d'entre elles seront en partie mises en lumière à l'intérieur du futur tunnel de la Croix Rousse "pour donner un élément d'animation dans la monotonie du parcours"...
Gilles Roman
Images tirées d'un site internet qui demande le classement Unesco des arêtes de poisson : http://aretesdepoisson.free.fr-
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